Mémoire

Numéro 3 – Octobre 2013

L’Édito

Couverture de : Mémoire

Toute la mémoire du monde

En 1956, Alain Resnais réalisait un documentaire d’une vingtaine de minutes intitulé Toute la mémoire du monde. On y voyait des images de la Bibliothèque Nationale défiler sur une musique inquiétante pendant qu’un texte en voix off expliquait que tout ce qui était conservé là, dans cette forteresse : des livres, des estampes, des médailles, et même des étoiles. En 1956, la Nationale recevait plus de deux cents kilogrammes de papier par jour. Qu’en est-il aujourd’hui, à l’heure où la presse est beaucoup plus diversifiée qu’à l’époque ? Le numéro de la NRC que vous tenez actuellement entre vos mains est sûrement en train d’y être entreposé à ce moment même, à côté des numéros précédents. C’est avec méthode que l’on archive tous les mots qui sont écrits chaque jour. Parce que la mémoire de l’homme est trop petite pour être exemplaire. Mais qui pense aujourd’hui à ce qu’est une bibliothèque ?

Aujourd’hui, cette mémoire du monde c’est Internet. Qu’il suffise que l’on ignore quelque chose et l’on se précipite sur son clavier à la recherche de l’information manquante, sans pour autant la retenir. Internet s’est donc imposé comme un immense réservoir de connaissances, rendant la mémoire humaine inutile : pourquoi s’encombrer à retenir des choses auxquelles on a accès à portée de main ? Il ne s’agit plus d’aller chercher pendant des heures dans les sous-sols d’une bibliothèque pour connaître la date de telle ou telle bataille. Organiser la publication d’un numéro portant sur le thème de la mémoire c’est donc appeler un constat sur l’état actuel de l’oubli.

Il est évident, et nous ne l’oublions pas, que nous remercions l’ensemble de nos contributeurs sans qui tout ceci n’aurait pu être fait. Nous avons tâché d’organiser leurs productions de façon à en garder la cohérence et à créer de nouveaux liens entre elles. Il faut surtout noter et saluer le fait que la plupart des contributions que nous avons reçues relèvent cette fois-ci de l’ordre de la création : beaucoup de dessins, de poèmes, de nouvelles… Comme s’il s’agissait non pas de se souvenir de productions passées (romans, films, oeuvres musicales), mais de donner quelque chose de nouveau à voir : fabriquer de la mémoire, en quelque sorte.
C’est aussi notre premier numéro édité avec notre nouvelle régie publicitaire, FFE. Nous remercions donc tout particulièrement M. Patrick Sarfati et Mme Yolande Ricart car sans leur soutien et leur confiance, la NRC n’existerait plus à l’heure qu’il est.

Enfin, nous saluons nos lecteurs parce qu’en lisant, ils fabriquent des souvenirs dans leur tête.

Léo SOLÉ

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